Marion "Je ne veux pas que cette relation avec ma belle-fille soit balayée par ma relation avec mon propre enfant"

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Belle-doche
9 min ⋅ 15/02/2023

Ce week-end, j’ai enfin lu “Ma belle” de Camille Anseaume, un roman qui interroge le rapport d’une belle-mère à sa belle-fille, Blanche, avec qui elle essaye de tisser un lien, mais qui se heurte, au mieux à son indifférence, au pire à sa mesquinerie. Je dois bien avouer que le premier tiers du bouquin m’a saoulée. Le décalage qu’il y avait entre ce personnage de marâtre bien sous tous rapports, bien sacrificielle “comme il faut” et qui croit qu’elle va verrouiller l’amour de son mec en lui faisant à dîner et en brossant les cheveux de sa “princesse”, m’a franchement gonflée. Mais si je m’étais arrêtée là, je serais totalement passée à côté de ce bouquin qui, petit à petit, renverse tout ça pour nous montrer à quel point les concessions du quotidien, l’impossibilité de dire, les petites cases dans lesquelles on nous enferme, pèsent sur les belles-doches. Même sur celles qui concourent pour le prix de la meilleure “mère bonus” de l’année (et j’écris ça sans jugement aucun, je ne me reconnais pas dans la figure de la belle-daronne qui repasse les caleçons et ne cuisine que des goûters maison mais je respecte que d’autres en aient envie). Et l’on ne boude pas notre plaisir quand ce livre distille quelques références bien senties sur notre rapport à notre image et sur la place de la beauté (qui répond à des critères bien étriqués) dans la valeur que l’on s’accorde et que l’on nous accorde. Un roman sur la belle-maternité qui finit par dézinguer les diktats, on dit oui !

Je n’occulte quand même pas que si je ne me suis pas reconnue dans ce personnage, même dans son évolution, c’est aussi parce que s’installe une rivalité avec sa belle-enfant, que je n’ai personnellement jamais expérimentée. Il est d’usage de dire qu’il est plus facile d’être belle-mère d’un garçon que d’une fille, si j’en crois ce bouquin, ça semble tout à fait juste, mais si j’en crois le témoignage de Marion qui suit, j’ai un petit doute ! Il faudrait lancer un sondage, pour voir. Tout ça pour dire que si cette histoire est à mille lieues de la mienne, et de celle de l’autrice, cette lecture m’a confortée dans l’idée que l’on a vraiment besoin de plus de récits nuancés et variés sur la belle-maternité, pas d’un énième miroir déformant ou grossissant de réalités clichés. Allez, venez, on raconte nos histoires !

Marion a 37 ans, elle est belle-mère “récidiviste” d’une fillette de (bientôt) 7 ans, et nous raconte l’histoire de sa famille recomposée qui compte 6 personnes : sa belle-fille (jusque-là rien d’étrange), son futur bébé (félicitations !), son amoureux (ok, on suit) et l’ex de ce dernier et son compagnon (ah vous ne l’aviez pas vu venir ! On les envie un peu, non ? Ben moi oui.)

Marion, comment es-tu devenue belle-mère ?

Marion : J’ai 37 ans, et je suis moi-même issue d’une famille recomposée. J’ai été belle-mère pour la première fois assez jeune puisque quand j’ai rencontré mon ex-mari, j’avais 26 ans et lui 48. Il avait quatre enfants de trois mères différentes : deux garçons d’une première mère, dont un qui avait deux ans de moins que moi,  une ado qui vivait avec sa mère et sa dernière fille, qui avait trois ans et demi lorsque je l’ai rencontrée. On s’entendait hyper bien elle et moi et je me suis beaucoup occupée d’elle, il a d’ailleurs joué sur le fait qu’il allait m’enlever sa fille pour me faire chier quand je suis partie. Elle avait alors 9 ans, je ne l'ai pas revue depuis. On s’est écrit, mais je veux maintenir le contact tout en lui expliquant qu’on peut arrêter si elle le souhaite. Elle n’a pas répondu à mon dernier message, et elle me manque beaucoup mais je ne suis pas pressée, elle fera comme elle voudra. Cette première expérience était toute de même top, notre relation était géniale et je m’en occupais comme si c’était la mienne. Je fais partie de cette catégorie de belles-mères qui se disent “Tu prends le père donc tu prends l’enfant”, j’estime que c’est mon devoir de faire en sorte que ça se passe le mieux possible. C’est un rôle que j’adore vraiment et ça comblait mon plaisir sans m’apporter de contraintes énormes. 

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Belle-doche

Par Anaïs Richardin

J'ai 37 ans, je suis autrice et journaliste et depuis quelques années, j’ai mis un pied dans la fiction. Roman, scénario, podcast, newsletter... j'explore différents sujets et des formes diverses pour raconter des histoires, vraies et un peu moins vraies, avec cette envie nichée au creux d'ouvrir, chez les autres, des petites fenêtres restées closes.

Je vis avec un ado que je n’ai pas mis au monde et j’ai eu envie, en 2022, de tendre l'oreille et mon micro à toutes ces femmes qui vivent, elles aussi, avec les enfants des autres et auxquelles je donne la parole dans "Belle-doche".

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